1. Introduction : La Vision Économique du Sénégal
Le Sénégal s’affirme comme un pôle économique majeur en Afrique de l’Ouest, tirant parti de sa position géographique stratégique et de ses relations politiques stables au niveau régional et international. Historiquement, Dakar a servi de centre administratif, commercial et de transport pour l’Afrique de l’Ouest francophone, notamment grâce au développement de son port et de ses réseaux ferroviaires. Cette centralité confère au pays un accès privilégié aux marchés régionaux et internationaux. Le Fonds Monétaire International (FMI) reconnaît le Sénégal comme l’une des économies à la croissance la plus robuste en Afrique subsaharienne.
La politique économique du gouvernement sénégalais est principalement articulée autour du Plan Sénégal Émergent (PSE), lancé en 2014. Ce plan ambitieux vise à transformer le pays en une nation émergente d’ici 2035, en mettant l’accent sur l’industrialisation et les innovations technologiques. Le PSE s’est fixé pour objectifs d’atteindre un taux de croissance économique annuel de 7 %, de réduire la pauvreté et d’améliorer les infrastructures essentielles.
En s’appuyant sur les progrès réalisés dans le cadre du PSE, le plan « Sénégal 2050 » présente une vision à plus long terme et encore plus audacieuse. Ce plan vise à tripler le revenu annuel par habitant, le faisant passer d’environ 1 691 USD en 2023 à 4 500 USD d’ici 2050, tout en maintenant un taux de croissance annuel moyen de 6 % à 7 %. Cette évolution des objectifs souligne une ambition économique plus profonde et plus large pour le Sénégal. Le passage d’un statut d' »émergence » d’ici 2035 à un objectif chiffré de triplement du revenu par habitant d’ici 2050 indique une compréhension plus concrète et mesurable du développement souhaité. Cela signifie une amélioration significative du niveau de vie moyen des citoyens, impliquant une transformation socio-économique durable qui s’étend au-delà des simples taux de croissance pour englober la création de richesse individuelle et une prospérité plus inclusive. La prolongation de l’horizon à 2050 suggère également une reconnaissance du fait qu’une transformation profonde et durable nécessite une planification sur une période plus longue que celle initialement envisagée par le PSE. Cette approche dénote une maturité dans la planification du développement, intégrant une perspective intergénérationnelle.
2. Paysage Macroéconomique
2.1. Croissance du PIB et Projections
L’économie sénégalaise a fait preuve d’une résilience notable face aux chocs externes. En 2023, la croissance du PIB réel a été estimée à 4,3 %, dépassant les projections initiales de 4,1 % et le taux de 3,8 % enregistré en 2022. Cette performance fait suite à une reprise économique post-pandémie vigoureuse de 6,1 % en 2021, après un ralentissement à 4,0 % en 2022.
Le pays est sur le point de connaître une croissance économique particulièrement robuste dans les années à venir, principalement grâce à l’entrée en production de son secteur pétrolier et gazier. Les projections indiquent une accélération significative de la croissance, avec un taux de 6,1 % attendu en 2024 et un impressionnant 8,4 % en 2025. La croissance hors hydrocarbures devrait se maintenir autour de 6 %. Pour 2026, une croissance de 4,1 % est prévue. Cette dynamique positionne le Sénégal comme un moteur économique potentiel en Afrique subsaharienne, surpassant la croissance moyenne projetée de 4,0 % pour la région en 2025.
La forte accélération de la croissance du PIB, passant d’environ 4 % en 2022-2023 à 8,4 % en 2025, est explicitement attribuée à l’émergence du secteur des hydrocarbures. Cette augmentation substantielle de la croissance suggère que le pétrole et le gaz ne sont pas seulement de nouvelles sources de revenus directs, mais qu’ils devraient également générer un effet multiplicateur significatif sur l’ensemble de l’économie. Cela pourrait se traduire par des investissements accrus dans les infrastructures connexes (pipelines, usines de traitement), la logistique et les services associés, créant ainsi des emplois et stimulant la demande dans d’autres secteurs. Cependant, cette dépendance croissante aux hydrocarbures introduit une nouvelle vulnérabilité : la sensibilité aux fluctuations des prix mondiaux des matières premières et aux retards éventuels dans la mise en œuvre des projets. Tout ralentissement ou baisse des prix pourrait considérablement affecter les prévisions de croissance, impactant la stabilité budgétaire et la capacité de service de la dette, d’autant plus que les niveaux d’endettement sont déjà élevés. Cette situation soulève des questions sur la durabilité à long terme et la diversification de l’économie au-delà des hydrocarbures.
Le tableau suivant présente une synthèse des indicateurs clés du PIB et de la croissance économique pour le Sénégal, incluant les projections récentes :
Tableau : PIB et Croissance Économique du Sénégal (2020-2026f)
Année | Population (Millions) | PIB Nominal (Mds USD) | PIB PPA (Mds USD) | PIB par Habitant (Nominal USD) | PIB par Habitant (PPA USD) | Croissance du PIB Réel (%) | Inflation (IPC, %) |
2020 | 17,0 | 24,5 | 58,7 | 1 490 | 3 504 | 1,3 | 2,5 |
2021 | 17,4 | 27,6 | 64,8 | 1 634 | 3 767 | 6,1 | 2,2 |
2022 | 17,8 | 27,7 | N/A | 1 599 | N/A | 4,0 | 9,7 |
2023 | 18,4 | 27,7 | N/A | 1 691 | N/A | 4,3 | 5,9 |
2024 | 18,6 | N/A | N/A | N/A | N/A | 6,1 | 0,8 |
2025 | 19,2 | 34,73 | 105,43 | 1 810 | 5 500 | 8,4 | 2,0 |
2026f | N/A | N/A | N/A | N/A | N/A | 4,1 | N/A |
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Sources :.
2.2. Dynamique de l’Inflation
L’inflation au Sénégal a atteint son niveau le plus élevé depuis des décennies en 2022, s’établissant à 9,7 %. Cette flambée était principalement due à l’envolée des prix des denrées alimentaires, qui représentent près de la moitié du panier de l’Indice des Prix à la Consommation (IPC) dans le pays.
Cependant, des données plus récentes indiquent une décélération significative. L’inflation s’était déjà modérée autour de 9 % en juillet 2023 , et les projections montrent une forte baisse à 0,8 % en 2024 et 2,0 % en 2025. Fin mars 2025, le taux d’inflation était même rapporté à 0,7 %. Cette diminution rapide suggère l’efficacité des interventions gouvernementales, bien qu’elles aient eu un coût. Les autorités sénégalaises ont réagi en augmentant les subventions aux combustibles et à l’électricité, qui ont représenté près de 4 % du PIB, et en relevant les salaires du secteur public d’environ 20 %. Ces mesures, visant à atténuer l’impact sur les citoyens, ont toutefois exercé une pression sur les finances publiques.
La baisse rapide de l’inflation de 9,7 % en 2022 à 0,7 % en mars 2025 est impressionnante, mais les mesures gouvernementales qui l’ont accompagnée, telles que les subventions massives et les augmentations de salaires dans le secteur public, impliquent des coûts budgétaires potentiellement non durables. En effet, ces dépenses importantes ont directement contribué à l’élargissement du déficit budgétaire et à l’augmentation de la dette publique. Il s’agit d’un compromis politique : un soulagement social à court terme au détriment de la santé fiscale à long terme. La viabilité de ces mesures de lutte contre l’inflation est remise en question, surtout à la lumière des niveaux de dette et de déficit plus élevés que ceux initialement déclarés. Les recommandations du FMI concernant la rationalisation des exonérations fiscales, la suppression progressive des subventions à l’énergie et un meilleur ciblage des dépenses sociales soulignent la nécessité de passer de subventions généralisées et coûteuses à des mesures plus ciblées et fiscalement responsables. Le succès futur de la maîtrise de l’inflation dépendra de la capacité du gouvernement à mettre en œuvre ces réformes difficiles.
2.3. Situation Budgétaire et de la Dette
Le Sénégal est confronté à des défis budgétaires importants, caractérisés par un déficit croissant et une augmentation de la dette publique. La dette publique avait déjà atteint plus de 76 % du PIB en 2022.
Un audit récent mené par le nouveau gouvernement a révélé un déficit budgétaire réel de 11,6 % du PIB en 2024, un chiffre nettement supérieur aux 4,9 % précédemment annoncés. De même, la dette extérieure a atteint 114 % en 2024, contre 74 % annoncés pour 2023 par le régime précédent. Cette réévaluation a conduit Barclays à estimer la dette publique du Sénégal à 119 % du PIB pour 2024, faisant du pays l’un des plus endettés d’Afrique. La dette de l’administration centrale seule s’élevait à 83,7 % du PIB en 2023.
Cette divergence dans les chiffres a entraîné la suspension du programme du FMI et une dégradation de la note souveraine du Sénégal. Le nouveau gouvernement met l’accent sur la transparence et la rigueur budgétaire, visant à réduire le déficit budgétaire à 7,8 % du PIB en 2025. Des mesures pour maîtriser le déficit ont déjà inclus des coupes dans les investissements publics. À plus long terme, les plans prévoient de ramener le déficit budgétaire à 3 %. Pour assurer la viabilité de la dette et maîtriser l’inflation, des mesures décisives sont nécessaires, telles que la rationalisation des exonérations fiscales, la suppression progressive des subventions à l’énergie et un meilleur ciblage des dépenses sociales.
La différence flagrante entre les chiffres budgétaires et de la dette annoncés et ceux révélés par l’audit (par exemple, 4,9 % contre 11,6 % pour le déficit de 2024, et 74 % contre 114-119 % pour la dette de 2023/2024) est une question de confiance majeure. Cette divergence a directement conduit à la suspension du programme du FMI et à la dégradation de la note souveraine du Sénégal. Cela a des conséquences immédiates sur l’accès du pays aux financements internationaux, le coût de l’emprunt et la confiance des investisseurs. Cela signale également un problème plus profond de gouvernance et de transparence. Bien que l’engagement du nouveau gouvernement en faveur de la transparence soit un pas positif, la reconstruction de la confiance avec les institutions financières internationales et les investisseurs sera cruciale et potentiellement difficile. Cette situation pourrait compliquer les efforts de mobilisation de financements externes pour les projets de développement et la gestion de la dette, ce qui pourrait à son tour affecter les objectifs ambitieux du plan Sénégal 2050. La « fausse déclaration » elle-même est un symptôme de problèmes de gouvernance plus profonds qui doivent être résolus pour garantir la stabilité économique à long terme et attirer des investissements durables.
3. Secteurs Économiques Clés et Moteurs
3.1. Piliers Traditionnels : Agriculture, Pêche et Mines
L’agriculture demeure un pilier fondamental de l’économie sénégalaise, contribuant à 16 % du PIB et employant près de 70 % de la population active. Ce secteur est dominé par les cultures vivrières telles que le riz, le mil et le maïs, ainsi que par les cultures d’exportation comme l’arachide et les fruits tropicaux. Malgré des investissements considérables, notamment dans le riz irrigué et la canne à sucre, les résultats ont été mitigés, en raison de rigidités structurelles, de contraintes techniques et de problèmes fonciers et sanitaires liés aux projets de barrages. Le secteur est fortement vulnérable aux conditions climatiques, telles que l’irrégularité des précipitations et la désertification, ce qui rend nécessaire le renforcement des infrastructures d’irrigation.
Le secteur de la pêche, historiquement un moteur d’exportation, a généré 239 millions de dollars de recettes d’exportation en 2000. Cependant, la pêche industrielle est confrontée à des coûts élevés et à une concurrence accrue, notamment de la part de concurrents asiatiques plus efficaces sur le marché français. Ce secteur est également sensible aux impacts du changement climatique, qui affectent les ressources marines et les stocks de poissons.
L’exploitation minière est une source importante de devises étrangères, avec une production de phosphate stable autour de 95 millions de dollars. Le Sénégal possède d’abondantes ressources naturelles, incluant le fer, le zircon, le gaz, l’or et les phosphates. L’augmentation récente des exportations d’or vers la Suisse souligne l’importance croissante de ce secteur.
En 2023, la contribution de l’agriculture au PIB était de 17,4 %, tandis que les mines et industries représentaient 24,3 % et les services 58,3 %. La répartition de la population active en 2023 était de 21,6 % dans l’agriculture, 22,3 % dans les mines et industries, et 56,1 % dans les services. Cette évolution marque un changement significatif par rapport aux estimations de 2007, où l’agriculture employait 77,5 % de la main-d’œuvre.
La transformation structurelle de l’emploi est mise en évidence par la forte diminution de la part de l’agriculture dans l’emploi (de 77,5 % en 2007 à 21,6 % en 2023), alors que sa contribution au PIB est restée relativement stable (environ 17 %). Cette observation indique soit une augmentation substantielle de la productivité du travail dans le secteur agricole, potentiellement due à la modernisation ou à la mécanisation, soit un déplacement massif de la main-d’œuvre rurale vers d’autres secteurs, très probablement le secteur informel des services. Ce dernier domine en effet le marché du travail. Cette situation pourrait signifier une sous-estimation de la contribution économique réelle du secteur informel ou un défi important en matière de création d’emplois formels pour cette main-d’œuvre migrante. Ce changement structurel a des implications profondes pour les politiques sociales, l’urbanisme et les stratégies de création d’emplois. Il souligne la nécessité de programmes robustes pour absorber cette main-d’œuvre, offrir des formations adaptées aux nouveaux secteurs et formaliser l’emploi informel afin de garantir la protection sociale et les recettes fiscales. Le défi du chômage des jeunes, en particulier des jeunes diplômés, devient d’autant plus critique dans ce contexte, car ils recherchent des emplois formels qui ne se développent pas assez rapidement.
3.2. Secteurs Émergents et Stratégiques
3.2.1. Hydrocarbures (Pétrole et Gaz)
Le Sénégal est sur le point de devenir un producteur et exportateur significatif de pétrole et de gaz. Les découvertes majeures en offshore, Sangomar (pétrole) et Greater Tortue Ahmeyim (GTA, gaz), ont été réalisées en 2014-2015. Alors que les projections initiales tablaient sur un début de production en 2023 , le champ pétrolier de Sangomar est devenu opérationnel en juin 2024, dépassant ses objectifs annuels avec 16,9 millions de barils produits en 2024. La première livraison de GNL du projet gazier GTA est prévue pour début 2025.
Le projet gazier GTA est une coentreprise avec la Mauritanie, impliquant BP (opérateur, 60-62 % des parts), Kosmos Energy (30-28 %), Petrosen (société nationale sénégalaise, 10 %) et la Société Mauritanienne des Hydrocarbures (SMH, 10 %). Le projet pétrolier de Sangomar est opéré par Woodside Energy (82 % des parts) en partenariat avec Petrosen (18 %).
La capacité de production de Sangomar est d’environ 100 000 barils par jour (soit 5 millions de tonnes par an). La première phase de production de GTA est de 2,5 millions de tonnes de GNL par an, avec un potentiel d’atteindre 10 millions de tonnes par an à terme. Les ventes de pétrole brut de Sangomar ont contribué à hauteur de 464,6 milliards de FCFA aux exportations en 2024, avec près d’un milliard de dollars de ventes en six mois en 2025.
Ces ressources offrent d’immenses opportunités pour stimuler l’économie. Cependant, le Sénégal est exposé aux risques de la « malédiction des ressources », notamment des attentes excessives, des pressions politiques en faveur de dépenses non durables et des incertitudes dues aux retards de production et à la volatilité des prix. Il est conseillé au gouvernement de planifier avec prudence, d’éviter les allégements fiscaux pour les projets déjà décidés et de procéder à des audits de coûts rigoureux. Les plans de « gas-to-power » pourraient fournir une énergie moins chère mais comportent également un risque de « piège du gaz », pouvant entraver la transition vers les énergies renouvelables. Le nouveau gouvernement vise à maximiser les bénéfices des ressources naturelles, envisageant potentiellement une augmentation de la participation de l’État.
Le paradoxe de la « malédiction des ressources » est particulièrement pertinent au Sénégal. Alors que le pétrole et le gaz sont projetés pour stimuler une croissance significative du PIB, les avertissements concernant cette malédiction et les niveaux déjà élevés de la dette publique créent une situation critique. La « malédiction des ressources » est généralement associée à une mauvaise gouvernance des revenus issus des ressources naturelles, entraînant la corruption, la « maladie hollandaise » (où le secteur des ressources éclipse les autres secteurs) et une augmentation de l’endettement. Les niveaux actuels de la dette du Sénégal et les révélations de fausses déclarations budgétaires suggèrent des faiblesses de gouvernance préexistantes qui pourraient être exacerbées par de nouveaux flux de revenus importants si ceux-ci ne sont pas gérés de manière transparente et prudente. La question n’est pas seulement de savoir si ces ressources généreront de la richesse, mais comment cette richesse sera gérée pour éviter les pièges historiques et assurer un développement équitable et diversifié. Le succès du secteur des hydrocarbures au Sénégal dépendra moins du volume d’extraction que de la solidité de son cadre institutionnel pour la gestion des revenus, la transparence et la diversification économique. L’engagement déclaré du gouvernement en faveur de la transparence et de la rigueur budgétaire, ainsi que les plans de création d’un fonds souverain, sont des étapes cruciales, mais leur mise en œuvre effective déterminera si le boom des ressources se traduira par un développement durable ou amplifiera les vulnérabilités existantes.
Le tableau ci-dessous fournit une vue d’ensemble des principaux projets pétroliers et gaziers au Sénégal :
Tableau : Projets Pétroliers et Gaziers Majeurs au Sénégal : Acteurs et Volumes Prévisionnels
Projet Nom | Type | Statut (Début Production) | Opérateurs/Partenaires Clés | Réserves Estimées | Capacité de Production | Utilisation Principale |
Sangomar | Pétrole | Opérationnel (Juin 2024) | Woodside Energy (82%), Petrosen (18%) | ~630 millions de barils | 100 000 barils/jour (5 Mt/an) | Exportation |
Greater Tortue Ahmeyim (GTA) | Gaz | Début 2025 | BP (60-62%), Kosmos Energy (28-30%), Petrosen (10%), SMH (10%) | 420 Mds m³ (potentiel 2 800 Mds m³) | Phase 1 : 2,5 Mt GNL/an (Potentiel : 10 Mt GNL/an) | Exportation (GNL), Électricité domestique |
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Sources :.
3.2.2. Infrastructures et Construction (BTP)
Le secteur du BTP connaît une expansion significative, soutenu par des investissements massifs de l’État et de partenaires internationaux, représentant près de 30 % des investissements publics. Parmi les projets majeurs figurent le Train Express Régional (TER) et le port en eau profonde de Ndayane. L’urbanisation rapide stimule la demande de logements sociaux et d’infrastructures publiques, attirant les promoteurs immobiliers. Cependant, ce secteur est confronté à des défis tels que le coût élevé des matériaux de construction, souvent importés, et la complexité des procédures administratives.
3.2.3. Économie Numérique et Télécommunications
Le Sénégal est en pleine révolution numérique, caractérisée par une forte adoption des technologies mobiles (plus de 100 % de pénétration), la digitalisation des services publics et un écosystème entrepreneurial dynamique. Les solutions de Fintech transforment le secteur bancaire avec une croissance rapide des paiements électroniques. Le secteur des télécommunications a contribué à lui seul à 7,6 % du PIB en 2020 et emploie environ 40 000 personnes. Les défis incluent une infrastructure Internet inégale, en particulier dans les régions reculées, un financement limité pour les startups et un décalage entre l’éducation/formation et les besoins du marché.
3.2.4. Énergies Renouvelables
Le Sénégal s’est fixé pour objectif d’augmenter la part des énergies renouvelables à 30 % de son mix énergétique d’ici 2030, avec des fermes solaires et éoliennes déjà opérationnelles. Cet objectif s’inscrit dans le cadre du Partenariat pour une Transition Énergétique Juste (JETP), un accord de 2,7 milliards de dollars signé avec les pays du G7 et l’Union Européenne. Ce partenariat vise à renforcer la résilience climatique dans le secteur de l’énergie, à augmenter la part des énergies renouvelables, à améliorer le stockage d’énergie et la stabilité des réseaux électriques, et à créer des emplois durables.
3.2.5. Tourisme et Hôtellerie
Le Sénégal est une destination touristique majeure, ayant attiré plus de 1,3 million de visiteurs en 2019, grâce à ses plages, son patrimoine culturel et sa biodiversité. Les recettes du tourisme ont atteint 120 millions de dollars en 2000. Les stratégies de développement incluent la promotion du tourisme culturel et de l’écotourisme. Les principaux défis sont le manque d’infrastructures répondant aux standards internationaux et une forte dépendance au tourisme international.
3.3. Services et Finance
Le secteur des services est le principal contributeur au PIB du Sénégal, représentant 60,2 % en 2022 et 58,3 % en 2023. Dakar fonctionne comme un important centre bancaire, commercial et de transport pour l’Afrique de l’Ouest francophone. Le secteur financier est l’un des sept « secteurs moteurs de croissance » identifiés par le PSE.
4. Défis Économiques et Sociaux Majeurs
4.1. Pauvreté et Inégalité
Malgré une croissance économique récente, le Sénégal continue de faire face à des taux de pauvreté élevés et à des inégalités significatives. L’incidence de la pauvreté était de 37,5 % en 2021/2022, une légère diminution par rapport à 37,8 % en 2018/2019. Cependant, cette amélioration est davantage attribuée à une baisse de la consommation des ménages plus aisés qu’à un gain réel pour les plus pauvres. Environ 33 % de la population vivait sous le seuil international d’extrême pauvreté de 1,90 dollar par jour en 2020. La pauvreté reste concentrée dans les zones rurales, en particulier dans le bassin arachidier.
La persistance de taux de pauvreté élevés et relativement stagnants, malgré une croissance du PIB constante, révèle un défi fondamental en matière de croissance inclusive. Les bénéfices de l’expansion économique ne sont pas équitablement répartis ou n’atteignent pas efficacement les populations les plus vulnérables. Cela indique que la croissance est soit concentrée au sommet, soit qu’elle ne génère pas suffisamment d’emplois de qualité ou de filets de sécurité sociale pour sortir une part significative de la population de la pauvreté. La prédominance du secteur informel et les difficultés des jeunes diplômés exacerbent cette situation, car ces segments manquent souvent de protection sociale et de revenus stables. Pour que le Sénégal atteigne sa vision à long terme de tripler le revenu par habitant et de construire une « société solidaire », un rééquilibrage délibéré vers des politiques plus inclusives est nécessaire. Cela implique de se concentrer non seulement sur les chiffres du PIB, mais sur la qualité de la croissance, en assurant la création d’emplois dans les secteurs formels, des dépenses sociales efficaces et ciblées, et en s’attaquant aux inégalités structurelles qui empêchent les pauvres de participer et de bénéficier du progrès économique.
4.2. Emploi et Intégration des Jeunes
Le marché du travail sénégalais est largement dominé par le secteur informel, qui représente 92 % de la main-d’œuvre et 44,6 % de la valeur ajoutée totale en 2020. L’emploi formel est limité (environ 8 % de la population active) en raison de réglementations rigides du marché du travail.
Le chômage demeure un défi persistant, avec un taux global de 16,7 % au quatrième trimestre 2020 et de 11,3 % au quatrième trimestre 2022. Il touche de manière disproportionnée les femmes (26,3 % au quatrième trimestre 2020 contre 9,3 % pour les hommes ) et les jeunes (41 % sans emploi ), en particulier les jeunes femmes (45,4 % contre 12,2 % pour les jeunes hommes ).
Malgré des niveaux d’éducation plus élevés chez les jeunes (55 % ayant suivi des études secondaires ou post-secondaires ), ils peinent à trouver un emploi, souvent en raison d’un décalage entre les compétences universitaires et les exigences professionnelles (16 %), d’un manque de formation adéquate (35 %) ou d’une réticence à accepter certains emplois (24 %). Une part significative des jeunes (40 % des 15-35 ans) ne sont ni en études, ni en emploi, ni en formation. La plupart des jeunes Sénégalais (74 %) aspirent à créer leur propre entreprise, la création d’emplois étant leur principale priorité en matière d’investissement public.
Le taux de chômage élevé parmi les jeunes diplômés, malgré leurs qualifications supérieures, met en évidence un décalage structurel critique sur le marché du travail. Ce phénomène représente une inefficacité sociale et économique majeure. Il signifie que le système éducatif ne produit pas les compétences demandées par le marché, ou que le secteur formel est trop restreint et rigide pour absorber le nombre croissant de travailleurs qualifiés. La prévalence du secteur informel complique davantage la situation, car les jeunes diplômés peuvent être réticents à y entrer, ce qui entraîne un chômage prolongé ou des intentions d’émigration. Cela constitue un gaspillage de capital humain et une source potentielle de frustration sociale et d’instabilité. Pour résoudre ce problème, une approche multidimensionnelle est nécessaire : une réforme des programmes scolaires pour les aligner sur les besoins de l’industrie, des politiques visant à réduire la rigidité du marché du travail formel et à encourager la création d’emplois dans les secteurs modernes, et un soutien accru à l’entrepreneuriat des jeunes, étant donné que la majorité d’entre eux souhaitent créer leur propre entreprise. Le taux élevé d’intention d’émigration (60 % des jeunes) souligne l’urgence de créer des opportunités viables au niveau national pour retenir les talents et prévenir la fuite des cerveaux.
4.3. Impacts du Changement Climatique et Adaptation
Le Sénégal est très vulnérable au changement climatique, avec des impacts significatifs sur ses systèmes biophysiques et socio-économiques. Ces impacts incluent la réduction des réserves d’eau, la salinisation des terres, la perte de biodiversité et une érosion côtière rapide, qui affecte gravement le tourisme. L’agriculture, un secteur clé, souffre de la sécheresse, de la désertification, de la dégradation des terres et d’inondations récurrentes, entraînant des pertes de production et une insécurité alimentaire. Les secteurs de l’élevage et de la pêche sont également négativement impactés.
La Banque Mondiale avertit que sans mesures d’adaptation, les effets du changement climatique pourraient réduire le PIB du Sénégal de 9,4 % d’ici 2050. En revanche, l’action climatique pourrait augmenter le PIB d’au moins 2 % d’ici 2030 et réduire la pauvreté liée au climat de 40 %. Des investissements de 1,36 milliard de dollars par an jusqu’en 2030 sont nécessaires pour l’action climatique, dont une part significative (au moins 40 %) devrait provenir d’investissements privés. Les priorités clés incluent le développement des énergies renouvelables, le transport durable, l’amélioration de la gestion des ressources naturelles, la promotion d’une agriculture intelligente face au climat et le renforcement de la gestion des risques de catastrophe.
4.4. Gouvernance et Environnement des Affaires
Les obstacles au développement économique comprennent une corruption significative, une justice inefficace et des formalités administratives lentes. La tendance du gouvernement à l’interventionnisme et des réglementations généralement défaillantes perturbent également l’environnement des affaires. La récente révélation de fausses déclarations importantes concernant le déficit budgétaire et la dette extérieure par le gouvernement précédent met en lumière des défis de gouvernance profonds et a conduit à la suspension des programmes du FMI et à une dégradation de la note souveraine.
Malgré ces problèmes, le Sénégal a déployé des efforts pour améliorer le climat des affaires, notamment en accélérant l’enregistrement des entreprises et les processus d’approbation des investissements. Le pays offre également des garanties de stabilité fiscale (5 ans) via son Code des Investissements, ainsi que des zones économiques spéciales (ZESID, P2ID, ZESS, ZESBS) avec des avantages douaniers et fiscaux.
5. Stratégies Gouvernementales et Perspectives Futures
5.1. Bilan du Plan Sénégal Émergent (PSE)
Le PSE, adopté en 2014, visait à relever des défis tels qu’une croissance économique faible et erratique, un chômage élevé, des inégalités sociales et une vulnérabilité aux chocs externes. Sa vision est celle d’« Un Sénégal émergent en 2035, avec une société solidaire, dans un État de droit », axée sur une croissance économique vigoureuse, la création d’emplois et une bonne gouvernance.
Le PSE a guidé le développement du Sénégal au cours de la dernière décennie. Le premier Plan d’Actions Prioritaires (PAP I, 2014-2018) a permis d’atteindre une croissance moyenne de 6,6 %. Globalement, la croissance économique moyenne pour la période 2014-2023 s’est établie à 5,3 %. Parmi les réalisations quantifiables clés figurent la création d’un million d’emplois directs et indirects , l’électrification de 724 villages ruraux , et des investissements significatifs dans les infrastructures, tels que le Train Express Régional (TER) et la réhabilitation des aéroports régionaux. Le PIB par habitant a atteint 845 450 FCFA en 2023.
Le troisième Plan d’Actions Prioritaires (PAP 3, 2024-2028) poursuit la mise en œuvre des politiques publiques, projets, programmes et réformes, en capitalisant sur les acquis passés et les leçons tirées. Il vise à maintenir une croissance stable et inclusive supérieure à 6 % en 2024. Le PSE identifie sept secteurs moteurs de croissance : activités extractives, services financiers, construction, production et distribution d’électricité et de gaz, activités scientifiques et techniques spécialisées, agriculture et fabrication de produits chimiques.
Le tableau suivant présente les chiffres clés des réalisations du PSE :
Tableau : Chiffres Clés des Réalisations du PSE (2012-2024)
Indicateur | Valeur | Période/Année |
Croissance moyenne du PIB | 5,3% | 2014-2023 |
Emplois créés (directs et indirects) | 1 million | 2012-2024 |
Villages ruraux électrifiés | 724 | 2012-2024 |
PIB par tête | 845 450 FCFA | 2023 |
Investissements (Programme Modernisation Villes) | 270 milliards FCFA | 2012-2024 |
Croissance économique | 4,1% | 2023 |
Croissance économique | 4% | 2022 |
Croissance économique | 6,1% | 2021 |
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5.2. Vision Sénégal 2050
Ce plan ambitieux à long terme vise à transformer le Sénégal en une nation indépendante et prospère. Ses quatre axes majeurs sont : la construction d’une économie compétitive, la durabilité environnementale, le développement du capital humain et la justice sociale, ainsi que la refondation de la gouvernance. L’objectif principal est de tripler le revenu annuel par habitant, le faisant passer d’environ 1 691 USD en 2023 à 4 500 USD d’ici 2050, avec un taux de croissance annuel moyen de 6 % à 7 %.
Le plan prévoit des investissements massifs, potentiellement jusqu’à 21 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, avec une augmentation annuelle de 14,7 % entre 2025 et 2029. Cependant, le financement reste un défi majeur. Le Sénégal compte sur les revenus du pétrole et de l’or, mais cette dépendance aux ressources naturelles présente des risques à long terme. Le plan vise également à mieux contrôler la dette publique (76,6 % du PIB en 2022 ) et à atteindre un objectif de déficit budgétaire de 3 %. Les solutions de financement proposées incluent la réforme fiscale (amélioration de la collecte des impôts, lutte contre l’évasion fiscale), le développement des Partenariats Public-Privé (PPP) et la rationalisation des dépenses de fonctionnement de l’État.
Les objectifs ambitieux de croissance et de développement du PSE et du plan Sénégal 2050 (7 % de croissance annuelle, triplement du revenu par habitant, investissements massifs) contrastent fortement avec les récentes révélations de niveaux de dette publique et de déficits budgétaires significativement plus élevés. Cet écart entre l’ambition et la réalité fiscale actuelle, exacerbé par des fausses déclarations passées, est un défi majeur. Pour atteindre ces objectifs, des financements substantiels et durables sont nécessaires. Cependant, le ratio élevé de la dette au PIB et les déficits importants limitent la marge de manœuvre budgétaire du gouvernement pour de nouveaux investissements ou pour absorber des chocs économiques. Une forte dépendance aux revenus du pétrole et du gaz, avant même leur pleine matérialisation et compte tenu de leur volatilité inhérente, ajoute une couche de risque supplémentaire. La suspension des programmes du FMI en raison des fausses déclarations budgétaires restreint davantage l’accès aux financements concessionnels, rendant les plans d’investissement ambitieux plus difficiles à concrétiser. Le succès du plan Sénégal 2050 dépendra donc de manière critique de la capacité du nouveau gouvernement à mettre en œuvre des réformes fiscales drastiques, y compris la mobilisation des recettes et la rationalisation des dépenses. Cela impliquera des choix politiques difficiles, potentiellement la réduction des subventions et une augmentation de la collecte des impôts, ce qui pourrait avoir des implications sociales. La crédibilité de l’engagement du nouveau gouvernement en faveur de la transparence et de la rigueur budgétaire sera primordiale pour restaurer la confiance des investisseurs et obtenir les financements nécessaires, tant auprès des partenaires internationaux que du secteur privé. La vision à long terme exige une discipline budgétaire à court terme.
5.3. Réformes Politiques et Prudence Budgétaire
Le gouvernement actuel met l’accent sur la transparence et la rigueur budgétaire. Cela inclut des efforts pour augmenter les recettes intérieures par des réformes fiscales et une meilleure application de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, sans augmenter la pauvreté ou les inégalités.
Le FMI a approuvé un accord de financement de 36 mois d’un montant de 1,5 milliard de dollars (MEDC et FEC) visant à réduire les vulnérabilités liées à l’endettement, à renforcer la gouvernance du secteur public, à lutter contre le blanchiment des capitaux et à promouvoir une croissance inclusive tirée par le secteur privé. Le Sénégal bénéficie également de la Facilité pour la Résilience et la Durabilité (FRD) du FMI, avec 324 millions de dollars sur trois ans pour des réformes liées au climat. Les réformes clés comprennent la suppression progressive des subventions non ciblées dans le secteur de l’électricité, l’adoption d’une stratégie de verdissement des transports publics et l’intégration des considérations climatiques dans le processus budgétaire. Le Partenariat pour une Transition Énergétique Juste (JETP) avec les pays du G7 et l’UE, d’une valeur de 2,7 milliards de dollars, est un partenariat significatif visant à soutenir la transition énergétique du Sénégal et sa résilience climatique. Cependant, l’instabilité politique récente et les fausses déclarations de données fiscales présentent des risques pour la mise en œuvre de ces réformes et la trajectoire économique globale.
6. Relations Économiques Internationales
6.1. Relations Commerciales
La balance commerciale du Sénégal a enregistré un déficit historique pour la deuxième année consécutive en 2023, atteignant -3 983 milliards de FCFA (-6,1 milliards d’EUR), soit une augmentation de 60 % depuis 2021. Cette situation est largement due à une augmentation plus importante des importations (+34 %) que des exportations (+11,8 %), principalement sous l’effet de l’inflation et des perturbations des chaînes d’approvisionnement affectant les importations essentielles (produits alimentaires, énergie).
En 2023, les exportations totales se sont élevées à 3 224 milliards de FCFA (4,9 milliards d’EUR), soit une baisse de 9,5 % par rapport à 2022. Le Mali reste le premier client du Sénégal (près de 23 % des exportations totales), suivi par la Suisse (12,1 %, principalement de l’or) et l’Inde (10,2 %). Les ventes de pétrole brut de Sangomar ont considérablement soutenu les exportations en 2024.
Les importations totales ont atteint 7 207 milliards de FCFA (11 milliards d’EUR) en 2023, un léger ralentissement mais toujours à un niveau historiquement élevé. La France a retrouvé sa position de premier fournisseur (12 %), suivie par la Chine (10,9 %), le Nigeria (8,6 %) et la Russie, qui a considérablement augmenté sa part de marché. Les produits manufacturés représentent plus de 70 % des importations, mais les achats de denrées alimentaires essentielles et de produits pétroliers restent très élevés.
Le Sénégal diversifie activement ses relations commerciales, comme en témoigne la part croissante de la Russie dans les importations. Cependant, la balance commerciale continue de présenter un déficit historique, principalement en raison de la dépendance aux importations essentielles (produits alimentaires, énergie). Cela suggère que la diversification seule ne suffit pas sans une augmentation correspondante de la production locale à valeur ajoutée. Cette situation indique une vulnérabilité structurelle : la forte dépendance aux sources externes pour les besoins fondamentaux rend l’économie sensible aux chocs de prix mondiaux et aux fluctuations monétaires. L’ambition du nouveau gouvernement de renforcer la « souveraineté économique » en générant davantage de valeur ajoutée locale répond directement à cette problématique. Une amélioration durable de la balance commerciale et de la résilience économique nécessitera non seulement une diversification des partenaires, mais surtout une modification fondamentale de la composition du commerce par la substitution aux importations et la diversification des exportations au-delà des matières premières. Cela implique des investissements massifs dans l’agro-industrie et la fabrication locale, ainsi que l’utilisation des nouveaux revenus des hydrocarbures pour renforcer les capacités productives et réduire la dépendance à long terme vis-à-vis des importations alimentaires et énergétiques. Le déficit commercial actuel, malgré les nouvelles recettes d’exportation de pétrole, signale que le défi structurel de la dépendance aux importations reste significatif.
Le tableau ci-après détaille les principaux partenaires commerciaux du Sénégal en 2023 :
Tableau : Principaux Partenaires Commerciaux du Sénégal (2023)
Catégorie | Rang | Pays Partenaire | Valeur (Mds FCFA) | Part (%) |
Exportations | 1 | Mali | N/A | ~23% |
2 | Suisse | N/A | 12,1% | |
3 | Inde | N/A | 10,2% | |
14 | France | N/A | N/A | |
Importations | 1 | France | N/A | 12% |
2 | Chine | N/A | 10,9% | |
3 | Nigeria | N/A | 8,6% | |
4 | Russie | N/A | N/A |
Export to Sheets
Sources :.
6.2. Investissements Directs Étrangers (IDE)
Le Sénégal a connu une augmentation des flux d’IDE, atteignant 1,617 milliard de dollars en 2023 , et le stock d’IDE a totalisé 11,729 milliards de dollars en 2022. Les flux d’IDE en pourcentage du PIB étaient de 15,6 % en 2023.
La France reste le premier investisseur, détenant 16 % du stock d’IDE en 2023, bien que sa part relative ait diminué de 66 % en 2015. Le stock d’investissements français au Sénégal est passé de 980 millions d’EUR en 2011 à 2,4 milliards d’EUR en 2023. D’autres investisseurs clés incluent le Canada, Maurice, le Maroc, la Chine, le Royaume-Uni et la Côte d’Ivoire.
Le Sénégal vise à augmenter son taux d’investissement de 20,6 % à 30 % et offre des incitations telles que des garanties de stabilité fiscale (5 ans) via son Code des Investissements, et des zones économiques spéciales (ZESID, P2ID, ZESS, ZESBS) avec des avantages douaniers et fiscaux.
Bien que la France reste le principal investisseur, sa part relative dans le stock d’IDE a fortement diminué, ce qui indique une diversification plus large des sources d’IDE. Cette tendance, combinée aux récents problèmes de gouvernance, souligne l’importance d’un climat d’investissement transparent et stable. La diversification des sources d’IDE est généralement positive, car elle réduit la dépendance à l’égard d’un seul pays et peut apporter des expertises et des accès aux marchés variés. Cependant, les faiblesses identifiées en matière de gouvernance (corruption, système judiciaire, lourdeurs administratives) et les récentes fausses déclarations budgétaires sont des freins importants pour tous les investisseurs, quelle que soit leur origine. Même avec des incitations attrayantes comme les zones économiques spéciales, des flux d’IDE soutenus dépendent d’un environnement commercial prévisible et fiable. La suspension du programme du FMI envoie un signal négatif à la communauté internationale des investisseurs. Pour pleinement tirer parti de sa position stratégique et de ses nouvelles richesses en ressources, le Sénégal doit prioriser le renforcement de son cadre institutionnel, garantir l’indépendance judiciaire, simplifier les processus administratifs et maintenir la transparence fiscale. L’engagement du nouveau gouvernement en faveur de la transparence est une première étape cruciale, mais une action cohérente est nécessaire pour restaurer la confiance des investisseurs et attirer la qualité et la quantité d’IDE requises pour atteindre les objectifs ambitieux du plan Sénégal 2050.
6.3. Intégration Régionale
Le Sénégal est membre de blocs économiques régionaux clés, notamment la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). La CEDEAO, composée de 15 États membres, vise à promouvoir l’autosuffisance collective et à créer un grand bloc commercial unique. Le commerce intra-communautaire au sein de la CEDEAO est relativement faible (10-15 % du commerce total), mais des études suggèrent que l’appartenance à la CEDEAO augmente considérablement les échanges entre ses membres (17,374 fois plus).
L’UEMOA, un sous-bloc au sein de la CEDEAO, a mis en place un marché commun avec la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux, ainsi qu’un tarif extérieur commun (TEC) depuis 2000. Le commerce intra-UEMOA est plus dynamique que le commerce au sein de la CEDEAO en général. La région s’oriente vers une monnaie unique, l’ECO, qui devrait stimuler davantage le commerce intra-régional. Cependant, des défis subsistent, notamment les problèmes de sécurité et la qualité des infrastructures régionales.
6.4. Aide Étrangère et Partenariats
Le Sénégal dépend de l’aide étrangère, recevant environ 350 millions de dollars par an de la France, du FMI, de la Banque Mondiale et des États-Unis, avec des contributions supplémentaires du Canada, de l’Italie, du Japon et de l’Allemagne. La France est le principal bailleur de fonds bilatéral d’aide publique au développement (APD), ayant engagé près de 2 milliards d’EUR depuis 2007 via l’AFD. Le portefeuille de l’AFD comprend plus de 70 projets en cours dans divers secteurs.
Le FMI soutient le Sénégal avec un accord de financement de 1,5 milliard de dollars (MEDC, FEC) et une Facilité pour la Résilience et la Durabilité (FRD) de 324 millions de dollars pour les réformes climatiques. Le Partenariat pour une Transition Énergétique Juste (JETP) avec les pays du G7 et l’UE, évalué à 2,7 milliards de dollars, est un partenariat significatif visant à soutenir la transition énergétique et la résilience climatique du Sénégal.
7. Conclusion : Forces, Défis et Voie à Suivre
L’économie du Sénégal a fait preuve d’une résilience remarquable face aux chocs externes, maintenant des trajectoires de croissance positives malgré les ralentissements mondiaux et les tensions politiques internes. L’entrée en production à grande échelle du pétrole et du gaz marque le début d’une nouvelle ère de croissance économique significative, avec des projections de 8,4 % de croissance du PIB en 2025. Cette nouvelle richesse en ressources, associée à un secteur des services dynamique et à une économie numérique en pleine expansion , positionne le Sénégal pour une transformation substantielle. Les visions à long terme du gouvernement, le PSE et Sénégal 2050, fournissent une feuille de route stratégique pour l’industrialisation, le développement du capital humain et la croissance durable. Son intégration régionale forte au sein de la CEDEAO et de l’UEMOA, ainsi que ses partenariats internationaux solides, renforcent davantage son potentiel.
Malgré ce potentiel, le Sénégal est confronté à des défis structurels profonds. La pauvreté et les inégalités persistent, les bénéfices de la croissance n’atteignant pas toutes les couches de la population, en particulier dans les zones rurales. Le chômage, notamment chez les jeunes diplômés et les femmes, demeure un problème critique, exacerbé par un secteur informel dominant et un décalage entre les compétences et les exigences du marché. Le pays est très vulnérable au changement climatique, ce qui représente des menaces à long terme pour des secteurs clés comme l’agriculture et le tourisme. De manière critique, les récentes révélations de fausses déclarations budgétaires significatives et de niveaux élevés de dette publique mettent en lumière des faiblesses de gouvernance sous-jacentes qui pourraient compromettre la stabilité macroéconomique et la confiance des investisseurs si elles ne sont pas résolues de manière décisive.
Pour une croissance durable et inclusive, des recommandations stratégiques s’imposent :
- Gestion Prudente des Revenus des Hydrocarbures : Il est impératif d’établir et de respecter rigoureusement des cadres de gouvernance transparents pour les revenus pétroliers et gaziers, y compris la mise en place d’un fonds souverain et de règles budgétaires strictes. Cela permettra d’éviter les pièges de la « malédiction des ressources » et d’assurer une distribution équitable et à long terme de la richesse. Les investissements issus de ces revenus devraient être priorisés pour diversifier l’économie au-delà des activités extractives.
- Assainissement Budgétaire et Transparence : La mise en œuvre de réformes fiscales décisives est essentielle pour réduire le déficit budgétaire et gérer la dette publique. Cela inclut la rationalisation des exonérations fiscales, la suppression progressive des subventions à l’énergie et l’amélioration de la collecte des impôts. La transparence dans la communication des données fiscales est cruciale pour restaurer la confiance des partenaires internationaux et des investisseurs.
- Développement du Capital Humain et Création d’Emplois Qualifiés : Pour relever le défi du chômage des jeunes et des femmes, il est nécessaire d’aligner les programmes éducatifs et de formation professionnelle sur les besoins réels du marché du travail, en particulier dans les secteurs émergents comme le numérique et les énergies renouvelables. Un soutien accru à l’entrepreneuriat des jeunes, avec un accès facilité au financement et au mentorat, est également vital pour canaliser leurs aspirations et créer des opportunités d’emploi formelles.
- Renforcement de la Résilience Climatique : Des investissements significatifs dans l’adaptation au changement climatique sont indispensables pour protéger les secteurs vulnérables comme l’agriculture et le tourisme. Cela implique le développement des énergies renouvelables, l’amélioration de la gestion des ressources naturelles et le renforcement des systèmes d’alerte précoce et de gestion des risques de catastrophe. La mobilisation de financements privés pour l’action climatique est également essentielle.
- Amélioration de la Gouvernance et de l’Environnement des Affaires : La lutte contre la corruption, la réforme du système judiciaire et la simplification des procédures administratives sont des étapes fondamentales pour créer un environnement des affaires plus prévisible et attractif pour les investissements nationaux et étrangers. La crédibilité du cadre institutionnel est un facteur déterminant pour le succès des stratégies de développement du Sénégal.